Télédétection : l'image et l'espace au service du développement

Inaugurée en 1972 avec le lancement du premier satellite américain d'observation civile, Landsat I, la télédétection spatiale trouve aujourd'hui sa véritable dimension au service du développement avec l'émergence des systèmes d'information géographique. Cartographie ou prévisions de récoltes, surveillance de la dégradation des milieux naturels ou détermination de leur potentiel agronomique : plus rien n'échappe au regard des satellites. De 80 m au départ, pour les plus petits détails, la capacité de résolution des satellites d'observation, situés à environ 800 km du sol, atteint aujourd'hui cinq à six mètres de sorte que les images numérisées que Spot renvoie vers la Terre permettent désormais de distinguer chaque case et chaque arbre d'un village. Beaucoup plus éloignés, jusqu'à 36 000 km pour les machines géostationnaires, les satellites météorologiques ont élargi démesurément l'angle de vision avec des images capables de couvrir chacune pratiquement tour le Sahel. Au total, plus d'une vingtaine de ces satellites opèrent en permanence au-dessus de nos têtes. Aux couleurs visibles étendues à l'infrarouge, les plus récents ajoutent l'imagerie par radar - pour des 'prises de vue' à travers l'épaisseur des nuages - ou par micro-ondes. Leurs images - que les spécialistes appellent des 'scènes' - livrent une multitude d'informations pour la cartographie et l'analyse des paramètres biophysiques des milieux. Les méthodes d'interprétation des données ont elles-mêmes gagné en précision grâce aux travaux fondamentaux d'un petit nombre d'institutions spécialisées. L'Institut international pour l'observation aérospatiale et les sciences de la terre (1) des Pays-Bas, connu depuis 1950 sous le nom d’ITC (International training centre for aerial survey), s'est ainsi acquis une réputation d'excellence en matière de traitement et d'interprétation de ces informations géoréférencées, en particulier pour la gestion des ressources naturelles et la définition de politiques de développement appropriées. Cependant, à l'exception des paramètres directement mesurables depuis l'espace, comme l'humidité de l'air, l'interprétation des informations fournies par les satellites nécessite de multiples contrôles à partir d'observations ponctuelles réalisées directement sur le terrain. Cet étalonnage systématique indispensable à la fiabilité des interprétations constitue un volet toujours essentiel des programmes et le coût de ce travail de terrain peut égaler voire dépasser celui de l'achat des 'scènes' correspondantes. Enfin, les progrès de l'informatique aidant, il est devenu possible, à l'aide d'un ordinateur à peine plus puissant qu'un simple PC, de rassembler des quantités phénoménales d'informations de toutes natures concernant une région et d'exploiter cette base de données spécifique, en particulier sous forme de carte thématiques superposables. Ces systèmes d'information géographique (SIG) permettent en particulier de corréler aisément les caractéristiques biophysiques d'une région - relief et topographie, nature et structure des sols, ressources hydriques, nature et développement du couvert végétal - à d'autres variables de nature socio-économique comme le type de culture, les réseaux de communication ou la densité de population. Gestion durable et aménagement des milieux Parmi les SIG les plus ambitieux, le projet pilote de prévision des productions agricoles au Sahel (P4AS) utilise des images du satellite météo NOAA pour suivre l'évolution des cultures et établir des prévisions de rendement sur l'ensemble du Sahel. Traitées par une station installée à Niamey (Niger) et complétées par des observations de terrain, ces images satellitaires permettront au CILSS d'établir en temps utile les prévisions de récoltes nécessaires à la gestion de l'aide humanitaire et à l'approvisionnement des zones déficitaires à partir des régions excédentaires. L'imagerie satellitaire permet de répondre à des questions très complexes - fournir un bilan de l'état de dégradation des ressources naturelles à l'échelle d'un pays entier, par exemple - dans des délais qui, sans elle, lanceraient des défis insurmontables. Une équipe mixte de l'Institut national des sols du Togo (Lomé) et de l'Orstom en a donné l'exemple en conduisant ce type d'étude exhaustive en une année, au Togo, en 1994 (2). Reproductible quasi à l'identique du Sénégal au Soudan, entre les isohyètes 800 et 1 500 mm, ce travail repose sur l'analyse d'un petit nombre d'images Landsat et Spot achetées pour moins de 150 000 FF et confirmées par des enquêtes de terrain pour lesquelles l'équipe a parcouru 35 000 km dans les différentes régions du p• ays. L'exploitation de cartes topographiques et thématiques classiques et l'interprétation d• es données historiques complètent le SIG. Les trois secteurs fortement dégradés du Togo ne couvrant pas plus de 5 % de la surface du pays, le diagnostic de situation est plutôt rassurant. L'étude montre cependant que l'intensification considérable du déboisement depuis quelques années, après 25 ans d'une politique de protection rigoureuse, pourrait entraîner une accélération de la dégradation des terres au cours de la prochaine décennie. D'où l'utilité d'une surveillance plus détaillée au niveau provincial. Le Cap-Vert, de son côté, a développé un SIG pour optimiser les choix d'aménagement de l'île de Santiago et améliorer l'utilisation agricole de ses ressources. La banque de données de ce système élaboré dans le cadre de l'institut de recherche agricole capverdien (INIDA), avec l'appui de l'institut de recherche du Portugal (IICT) et du service de cartographie et d'information géographique (CIG) du Cirad, dresse dès à présent l'inventaire des ressources naturelles de l'île : climat et hydrologie, relief, morpho pédologie, végétation, biodiversité. L'ajout de nouvelles 'couches' thématiques est prévu pour la démographie, l'urbanisation et le parcellaire, mais ce système expert est déjà opérationnel, notamment pour la conception de réseaux optimisés de distribution d'électricité et d'eau sur l'ensemble de l'île ou l'aménagement de petits bassins versants. En réalité, la puissance de traitement de ces SIG les impose dès à présent en tant qu'outils pour la conception des politiques de développement et de gestion des ressources naturelles. (1) International Institute for Aerospace Survey and Earth Sciences, PO Box 6, 750CAA Enschede, PAYS-BAS. Fax : (31) 53 4874 400. (2) Actes du symposium international AISS, Ouagadougou (BURKINA FASO) du 6 au 10 février 1995 : Surveillance des sols dans l'environnement par télédétection - Monitoring soifs in the environment with remote sensing and GIS, pp 479 - 483. Orstom Editions, Collection 'Colloques et séminaires de l'Orstom'.

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Bibliographic Details
Main Author: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation
Format: News Item biblioteca
Language:French
Published: Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation 1997
Online Access:https://hdl.handle.net/10568/61473
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